A ceux qui se croient en droit de juger mon célibat

J'ai la trentaine bien dépassée maintenant et toujours pas assumée... Avoir trente ans (et maintenant 32) m'a clairement porté un coup. Comme toutes les femmes, j'ai dressé un bilan qui ne m'a guère semblé satisfaisant à cet âge là. Mais on s'accommode de ce qu'on a et on essaye de grandir et d'évoluer avec les cartes qui nous sont données. Un gros point d'ombre au tableau, je suis célibataire depuis quelques années maintenant... Je ne le vis pas forcément très bien à tous les moments de ma vie, comme la plupart des gens je pense. Mais j'ai l'impression que dans l'ensemble, je ne le vis pas trop mal non plus, voire même je le vis bien la plupart du temps. Cependant, ce n'est pas parce que je suis célibataire que je me jetterai à la bouche du premier venu sans lui demander son consentement. Et je ne suis effectivement pas prête à tout pour être en couple.
Malheureusement, il semble que ce ne soit pas à moi que mon célibat pose le plus de problèmes mais à la société, aux conventions, aux bien pensants, aux gens qui me connaissent à peine et parfois à ma famille voire même à des gens que j'aurai pu considérer comme des amis (je vous rassure il y a aussi des gens qui s'en foutent, ce sont les gens qui m'aiment vraiment et je le leur rend bien). Bref, ces gens, qui pensent savoir ce que je ressens, et qui au détour d'une conversation, que tu as par-dessus tout essayé d'éviter parce qu'elle te fait mal au cœur, te font ressentir que si tu es célibataire passée trente ans c'est certainement que tu est une connasse exigeante et caractérielle qui a des problèmes psy et que si tu veux que ça change cocotte va peut-être falloir que tu" t'arranges", "fasses des efforts" ou "mettes de l'eau dans ton vin" (si si j'ai bel et bien entendu ces phrases surfaites).

Qui sont ces personnes qui me donnent des envies de meurtres sanglants ou de génocide justifié ? C'est cette personne que tu vois pour la troisième fois de ta vie en pas loin de dix ans, qui se pense supérieure parce que c'est un vieux con réac de l'âge de tes parents, c'est ton grand-père que tu adores mais qui devrait se calmer avec ses remarques à la con, c'est ton oncle, ta tante, ton/ta cousin/cousine ou parfois tous en même temps, c'est les amis de tes parents ou les amis de leurs amis, c'est l'esthéticienne de tata Cécile, c'est le copain de ta cousine que tu rencontres pour la première fois, c'est le serveur du bar PMU qui a entendu parler de toi par la postière du village de tes parents, ou le beau frère un peu relou d'une de tes potes qui a quelques années de plus et qui se vantent d'avoir du pognon à défaut d'avoir une vie épanouissante. En bref, c'est n'importe qui, celui qui se croit plus malin que les autres et qui, au moment d'un blanc dans une soirée, a décidé de te prendre pour cible histoire de se sentir mieux dans sa vie en te posant la question fatidique et relou que tout célibataire redoute : "alors les amours?".
Alors, toi pauvre célibataire, pour éviter le drame, parce que le meurtre en soirée ça casse toujours un peu l'ambiance (sauf si tu es à une murder party), tu utilises un subterfuge, vieux comme Hérode, que tu as mis des années à rendre crédible et qui finalement ne dupe personne : tu nies farouchement avec des excuses bidons "pour le moment ce n'est pas vraiment une de mes priorités", "je suis très bien comme je suis" et que "c'est pas non plus une fin en soit"...
Alors qu'en vrai, intérieurement, tu souffres et tu saignes de cette question inopportune et de ce jugement indirect... Et c'est là, que ces bien-pensants égocentriques, qui te connaissent à peine, en rajoute une couche avec la phrase bateau qui me fait hurler intérieurement depuis des années "t'inquiètes ça viendra" ou sa variante footballistique "t'inquiètes la roue tourne"... Mon œil que la roue tourne!!!! (j'ai du être une sacrée garce dans une vie antérieure si vous voulez mon avis) Et finalement les bien-pensants qui voient votre avenir se transforment en mauvais commentateurs sportifs qui se permettent de refaire le match de votre vie, qu'ils ne connaissent toujours pas (parce qu'ils ne s'intéressent pas vraiment à votre vie, ils veulent juste affirmer leur supériorité), en vous donnant de conseils même pas valables et purement stéréotypés.

Je m'insurge aujourd'hui parce que j'ai vécu cette situation pas plus tard qu'hier. Lors de l'anniversaire de mon oncle, le compagnon d'une amie de ma tante (pour vous dire que ça peut aller chercher loin), que j'ai du voir il y a trois ans au cours d'une soirée où je lui ai à peine dit bonjour, a cru bon, sous les vapeurs d'alcool, d'analyser une situation erronée. Il est parti sur le sujet à partir d'une remarque parfaitement déplacée de mon grand-père qui m'a sorti un "faudrait peut-être songer à se marier"... Donc sur cette phrase qui m'a tellement blessée que j'aurai préférée l'ignorer, ce type que je connais à peine, s'est cru bon de me donner un conseil parfaitement inapproprié : " A mon avis (ah ah ah parce qu'il a un avis) tu es certainement trop exigeante, tu devrais mettre de l'eau dans ton vin". Donc j'aurai pu me faire larguer la veille ou le mois dernier, avoir divorcé deux fois, être veuve, avoir eu des enfants, avoir fait une fausse couche, avoir un copain infidèle... Qu'il n'en aurait rien su puisque je n'étale pas forcément ce genre de choses lors des repas de famille et que dans cette famille qui a tendance à juger rapidement (je me compte parfois dans ce jugement même si après je m'en veux), j'ai tendance à cacher une partie de ma vie privée (pas à toute la famille, à celle qui n'a pas accès à ce blog principalement).
Heureusement pour lui, les bonnes bouteilles ouvertes par mon oncle coulaient dans mes veines à l'heure de son conseil parfaitement inapproprié. J'ai donc essayé de ne pas voir rouge (vin rouge, vous l'avez ? Ok elle est mauvaise mais je n'ai pas pu m'en empêcher). J'ai essayé de ne pas l'agresser, de ne pas lui rendre la monnaie de sa pièce ou de ne pas violenter verbalement ou physiquement, parce que ça reste quand même l'ami de mon oncle. J'ai pris une grande inspiration, puis je me suis renfermée sur moi-même en essayant de ne pas pleurer, me sentant de plus en plus vide. Parce qu'en passant la journée à jouer avec le bébé d'une cousine plus jeune que moi avec une autre cousine plus jeune que moi et nouvellement mariée, mon moral avait déjà pris un gros coup (même si je suis très heureuse pour mes cousines, je ressens malgré tout une petite pointe de jalousie). Cet inconnu égocentrique pensant me connaître a réussi à me porter le coup de grâce. Je me sentais vide, seule et légèrement désinhibée par l'alcool, au point de penser à faire une connerie (reprendre contact avec un ex) sans pour autant en arriver à cette extrémité (merci le soutien à toute épreuve de ma codépendante affective). J'ai donc pris sur moi, sourit et fait semblant de prendre part aux conversations jusqu'à ce qu'on parte (espérant qu'on abrège rapidement mes souffrances) alors qu'en fait je ne faisais que ressasser cette phrase sournoise "tu devrais être moins exigeante, mettre un peu d'eau dans ton vin"...

Je l'ai ressassé à tel point que j'en ai fait une force et que j'ai fini par la trouver flatteuse (merci le Graves, le Haut-Médoc et le Saint-Emilion). Parce que finalement, j'ai fini par m'apercevoir que dans l'esprit de ces gens qui me jugent, j'avais le choix. Pour eux, je choisis de ne pas sortir avec quelqu'un parce qu'il ne correspond pas à mes critères, ce n'est pas que personne ne s'intéresse à moi, que je n'ai pas d'occasions, de propositions. C'est simplement que je suis trop exigeante et que je trouve un défaut à tous ces mâles qui viennent faire la queue devant ma porte, me suppliant de leur accorder un minimum d'intérêt puisque dans leur esprit, ils ont l'air assez nombreux... Je vous avoue que je finis par apprécier ce concept de file indienne masculine si seulement il pouvait être réel. Je ne me connaissais pas ce pouvoir mais finalement si c'est ça être exigeante, je pense que je vais m'en contenter et je vais même le prendre comme un compliment.
Mais sachez chers êtres supérieurs bien-pensants et égocentriques, que je n'ai en fait que très peu d'exigences, simplement il n'y a personne devant ma porte... voilà ce qui explique mon célibat.

Celui qui était une évidence

Bon soyons honnête : je suis fleur bleue. Je ne vous mentirai pas. J'ai été élevée avec des histoires de princes et de princesses. Je me suis gavée de comédies romantiques. Je connais par cœur les répliques des films Quand Harry Rencontre Sally (de loin le meilleur film de tous les temps), Bridget Jones ("je vous aime beaucoup telle que vous êtes") et Orgueil & Préjugés. Je ne lis quasiment que de la romance où des filles seules finissent invariablement par trouver le grand amour de leur vie, la plupart du temps sur un malentendu. Enfin, il m'arrive de regarder les téléfilms de l'après-midi (vous voyez de quoi je parle, ces téléfilms tout niaiseux et plein de bons sentiments sur lesquels vous zappez). Donc voilà, j'éprouve un grand plaisir à me délecter de ces histoires "à l'eau de rose" sans pour autant forcer personne à faire de même. J'ai cependant conscience que ce n'est pas la vraie vie, je ne crois pas au coup de foudre et j'ai l'intime conviction que l'amour ça se construit à deux, ça se renforce et ça s'entretient.

Jusqu'à il y a quelques mois, nourrie pendant toute ma vie de tous ces stéréotypes, qui j'en avais la certitude ne m'avaient pas atteint, j'étais persuadée de savoir ce que je devais ressentir lorsqu'on trouvait la bonne personne. Donc armée de mes stéréotypes, persuadée de me connaître suffisamment, percluse dans mon hypocrisie, je pensais savoir ce que j'attendais d'un homme et de la relation que je souhaitais construire avec lui. En voici une liste non exhaustive : l'humour, l'honnêteté, l'entièreté, la conversation, la passion, les fameux papillons dans le ventre et bien sûr une forme d'attirance physique. Lorsque j'arrivais à quelque chose proche de cette combinaison, j'essayais de voir ce que ça pouvait donner. Je fonçais alors tête baissée dans une relation, pour le moins voué à l'échec, persuadée que c'était ce dont j'avais envie. Venait alors l'attente, les questionnements, les moments d'angoisse dans l'attente d'un texto, la volonté constante de plaire, les efforts pour paraitre sous son meilleur jour en permanence, les moments calculés, la sur-interprétation des silences autant que des conversations et l'analyse requise des copines dans ces moments de sur-interprétation. En gros la partie séduction était épuisante moralement à cause des nombreuses prises de tête et l'angoisse de la rupture, si relation il y avait, prenait un certain temps à se dissiper. Mais j'étais persuadée en mon fort intérieur que la séduction et la romance c'était ça et ça m'apportait une certaine forme de bien-être malgré tout puisque j'étais persuadée que c'était ce que je voulais. Vous pouvez appeler ça du masochisme, j'en ai maintenant consciente.

Et puis IL est arrivé et il a fait voler toutes mes certitudes stéréotypées en éclat. Il est donc maintenant temps de vous parler de LUI, mon évidence. 

Je le connais depuis maintenant quelques années (le temps passe trop vite) par le biais d'un couple d'amis communs. La première fois que je l'ai rencontré, je l'ai trouvé très très séduisant, je l'ai toujours trouvé beau. Je vais encore une fois être honnête : il est beau. Puis il a ouvert la bouche... Je l'ai trouvé tout de suite moins séduisant, atteint d'une épuisante incontinence verbale (et c'est moi qui le dit), d'un arrogance à peine feinte et d'une volonté d'avoir le dernier mot... Il m'a clairement agacé. Les fois où l'on s'est croisés par la suite l'impression que j'avais de lui est restée la même et finalement je faisais avec sa présence plus qu'autre chose. 

Puis il y a quelque mois... IL a eu besoin que je l'héberge. Durant la soirée, on a discuté, je l'ai trouvé un peu plus posé, calme et finalement assez ouvert à la discussion. A cette époque, aucunement intéressée par sa personne et en pleine période de révision de concours, je n'avais fait clairement fait aucun effort (je parle d'effort physique : vêtements révélateurs et maquillage ou au moins anti-cernes). On s'est revu deux ou trois fois par la suite, toujours à son initiative, sans que je comprenne vraiment qu'il était intéressé à cause de plusieurs maladresses plutôt attendrissantes. Pour moi c'était un pote plutôt bavard avec qui je pouvais parler d'impressionnisme, d'astronomie ou encore fomenter des théories plus qu'abstraites sur la fin de Game of Thrones. J'appréciais de passer du temps avec lui mais sans en avoir besoin.
Puis il y a eu cette soirée où tout a basculé. La bizarrerie des conversations abordées, le rapprochement furtif et mutuel sur le canapé, la tentative de corruption à l'aide d'une paire de lunette... J'ai finalement rapidement compris qu'à la fin de cette soirée, on s'embrasserait et encore aujourd'hui je ne peux pas vous expliquer comment ni pourquoi c'est arrivé
Mais ce que j'ai ressenti lors de ce baiser m'a complètement fait revoir mes priorités. Malgré tout ses défauts (mais pas que) et nos nombreux points de désaccord, j'ai juste ressenti l'évidence de ce baiser, de cette relation. Ça devait être comme ça... Comme si au moment de ce baiser, une partie du puzzle de ma vie avait réussi à s'imbriquer tout seul alors que j'essayais d'y aller en force depuis des années. Sur ce baiser, j'ai compris que c'était LUI, c'était simple, c'était comme ça. Ça n'a pas été le meilleur des baisers mais je ne me suis pas pris la tête, je n'ai pas attendu après quoique ce soit, je n'ai pas essayé de paraitre ce que je n'étais pas, j'ai juste vécu ma vie.  Et ça a été reposant et épanouissant, j'ai compris que la séduction, la romance et les sentiments amoureux n'avaient en aucun cas à être angoissant, prise de tête ou travaillé.

Malheureusement, à peine quelques jours après ce baiser qui avait chamboulé ma vision des relations amoureuses, IL est revenu sur ce baiser. IL a préféré qu'on reste ami. Je vous rassure, je ne suis pas masochiste à ce point. Ça aurait été au-dessus de mes forces, nous ne sommes pas restés amis. Il n'a rien fait pour que ce soit le cas non plus et je ne sais pas si je le regrette ou pas. Avec le temps j'ai fini par me dire qu'il avait eu peur que ça marche, qu'il l'avait ressenti lui aussi mais il n'était clairement pas dans une période de sa vie où il souhaitait s'engager. J'avoue que, pour mon égo, j'ai préféré me dire ça plutôt que de penser que je n'étais pas assez jolie, intéressante, intelligente ou autres... Qu'un quelconque manque chez moi avait fini par lui faire regretter ce baiser. Ou qu'IL ait eu des exigences que je ne pouvais pas faire basculer.

Une chose est sûre, puisqu'à toute chose malheur est bon, je sais maintenant ce que j'attends d'une relation. J'attends l'évidence, la simplicité et je sais maintenant qu'elle arrive sans que je la provoque par de faux sentiments issus de stéréotypes à la noix... Reste à savoir si elle se représentera et avec qui. Prêt à me suivre dans l'aventure ?